Si le lieu d’origines des Tortellini fait l’objet d’anciennes diatribes et se confond entre histoire et légende, l’importance de leur présence sur la table de Noël est certaine, surtout dans les régions du centre de l’Italie.
La question des origines a des contours plutôt flous. Si Bologne, Castelfranco Emilia et Modène s’en disputent la création, ce qui est sûr est que le tortellino est né en Émilie.
Et il ne faut pas le confondre avec le cappelletto qui est originaire de la Romagne, de plus grande taille et farci différemment (non seulement de la viande, mais aussi du fromage).
L’histoire des Tortellini : entre légende et réalité
La légende…
Comme pour toute légende, plusieurs versions existent concernant l’origine du Tortellino, y compris celles d’inspiration mythologique.
Deux légendes sont liées à l’auberge Corona de Castelfranco Emilia, ville qui à l’époque était sous le contrôle de Bologne. La première légende raconte qu’un jour une très belle Marquise arriva à l’hôtel pour y passer la nuit après un long voyage. Charmé par l’incroyable beauté de la dame, le propriétaire, épiât par le trou de la serrure et aperçut son nombril. Ce dernier lui donna l’inspiration de créer le cappelletto en reproduisant sa forme.
La deuxième légende est d’ordre mythologique et met Vénus à la place de la Marquise. Pendant la guerre entre Modène et Bologne provoquée par la « Secchia rapita » (le seau enlevé), Vénus, Bacchus et Mars trouvèrent refuge à l’auberge Corona, en se rendant au secours de Modène. Le lendemain matin, Mars et Bacchus quittèrent l’auberge, laissant Vénus endormie. À son réveil, elle appela l’aubergiste et dévoila son nombril, ce qui captura l’imagination de l’homme qui courut en cuisine et recréa cette merveille en donnant naissance au tortellino.
Peu importe qu’à l’origine il y est une dame ou une déesse, la tradition veut que la forme originale du tortellino prenne l’inspiration du nombril d’une femme.
…l’histoire
Des informations concernant les tortellini apparaissent déjà au XIe siècle, quand, dans un de ses manuscrits, l’historien Cervellati cite la présence des « Tortellum ad Natale » sur la tablé des habitants de Bologne. A partir du début du XIVe siècle, les références historiques et littéraires commencent à apparaitre, par exemple dans des recettes. Mais la plus importante des références est celle de Giovanni Boccaccio qui cite le tortellino dans une de ses nouvelles.
Bien évidemment, Pellegrino Artusi ne pouvait pas ignorer la recette des tortellini dans son livre « La scienza in cucina e l’arte di mangiar bene » publié en 1891.
Son internalisation en revanche, remonte au 1904, quand les frères Bartani, d’origine Émilienne, présentent le tortellino à la foire de Los Angeles.
La recette officielle
Celle des Tortellini est une des rares recettes dont existe une version officielle et enregistrée.
La « Dotta Confraternita del Tortellino » (Dotte Confrérie du Tortellino) a été créé en 1965 afin que les origines et les traditions typiques de cette extraordinaire recette soient préservées.
Le 7 décembre 1974, en collaboration avec l’Accademia Italiana della Cucina (Académie italienne de la cuisine), la Confrérie a déposé l’authentique recette de la farce et de la préparation du bouillon du « Tortellino de Bologne » par un acte notarié. De plus, le 15 avril 2008, à la Chambre de commerce de Bologne, la « Dotta Confraternita » a déposé, également par acte notarié, la recette des caractéristiques typiques du Tortellino classique de Bologne, tout comme les étapes de sa réalisation : la forme, la particularité de la farce, l’épaisseur de la pâte, ainsi que le poids final de 5 grammes. En 2013, la marque de la Dotta Confraternita del Tortellino a été enregistrée.
Les différences entre les Tortellini de Bologne et de Modène
Bien évidemment, plusieurs différences existent entre le tortellino Bolonais et le Modènois. À Bologne, il est appelé turtlén, tandis qu’à Modène c’est turtléin, mais la principale différence réside dans la farce. Dans les deux cas, le tortellino était produit seulement pour des occasions et des fêtes spéciales et à son origine il y avait le recyclage de la viande restante sur la table des nobles fortunés.
La version Bolonaise prévoit : longe de porc marinée pendant 2 jours avec de l’ail, du romarin, du sel et du poivre, cuite ensuite lentement dans une cocotte avec une noix de beurre, à laquelle on ajoute du jambon cru, de la mortadelle de Bologne, du parmesan, 1 œuf, de la noix de muscade. Le tout ensuite finement haché à la planche à hacher.
La version Modénoise prévoit : longe de porc coupée en dés et sautée à la poêle pendant quelques minutes, jambon cru de Modène, mortadelle, parmesan affiné, 1 ou 2 œufs, noix de muscade, poivre blanc et sel. Le tout finement haché au hachoir à viande.
La pâte dans les deux versions est préparée exclusivement à la main et étirée au rouleau à pâtisserie pour maintenir porosité et élasticité. La fermeture du tortellino se veut autour de l’index à Modène, et autour du petit doigt à Bologne.
Une autre différence concerne le bouillon qui à Bologne est de chapon et de bœuf, où l’os ne doit pas manquer, tandis qu’à Modène est de poule, préparé le matin pour être consommé le soir.
Entre gourmandise et culture
Les tortellini de Bologne incarnent donc parfaitement les principes que l’UNESCO a voulu sauvegarder avec l’introduction de la cuisine italienne dans la liste du Patrimoine Culturel Immatériel : une tradition vivante, un savoir-faire transmis de génération en génération, et une philosophie de vie entre partage, identité et créativité.
Ce Noël à la table du réveillon, donnez de la place à la convivialité et proposez à vos invités des Tortellini de Bologne !
Curiosité
Chaque année, à Bologne, se tient un concours pour élire le meilleur tortellino. Les participants sont jugés sur la finesse de la pâte, la qualité de la farce et la perfection de la forme. Le gagnant reçoit le prestigieux « Tortellino d’Oro », une récompense qui consacre l’excellence artisanale.
